Colombie-Equateur
Latitude 0°00,00000
Deux visites très instructives sur la latitude 0°00,00000. On y apprend comment les peuples précolombiens avaient déjà identifié et utilisé cette zone particulière du globe : de nombreuses villes (dont Quito) et sites mystiques sont construits sur des points calculés à partir de la Mitad del Mundo (le milieu du monde).
Un guide nous explique pourquoi la représentation classique du globe terrestre, avec le Nord en haut et le Sud en bas, est erronée ; et de nous faire part du projet du groupement scientifique auquel il appartient d’utiliser le globe avec l’Est devant nous, c’est-à-dire en haut sur nos cartes.
Il nous fait remarquer que le mot « orientation » vient du mot « orient », synonyme de « Est »… on devrait donc s’orienter non pas avec le Nord, mais avec l’Est ! Et il nous rajoute une couche d’étymologie (Tanguy, qui d’habitude déteste les cours d’étymologie du CNED, devient ici passionné;-)) : le mot Nord vient du sanscrit, langue d’Inde, et signifie « gauche ».
Mais pourquoi est-ce ce pays qui porte le nom Equateur, et non pas un autre territoire placé aussi sur cette ligne ? Et bien parce que c’est ici qu’il y a les plus hautes montagnes à l’horizon, montagnes qui ont permis aux scientifiques de prendre les mesures et faire les calculs par triangulation, au début du XVIIIème (expédition française dont parle tous les musées à Quito).
Quichuas
Niveau ressenti, l’Equateur nous fait penser à un mix Colombie-Guatemala. Sauf qu’ici ce n’ sont pas les Mayas, mais les Quichuas. Quelle culture encore présente partout dans le pays ! En campagne bien sûr, mais aussi en ville notamment lorsque les Indiens viennent vendre leurs productions sur les marchés. Sur les centaines de kilomètres parcourus dans les Andes équatoriennes, nous en voyons des femmes, hommes et enfants travailler la terre sur des montagnes ultra-pentues !
Tant de montagnes complètement déboisées et cultivées jusqu’à leur somment ; la montagne est un patchwork, dégradés de vers et jaunes. Quand nous dormons à Cajabamba, ville quasi exclusivement quichua, nous sentons que le niveau de vie est plus bas que dans les villes précédentes. En discutant avec un employé de la banque coopérative de cette ville, on apprend par exemple que les gens empruntent 1800 dollars (monnaie officielle qui a remplacé le Sucre à la fin des années 90s) pour acheter une vache, qu’ils remboursent par coup de 80-90 dollars par mois. Ces remboursements mensuels font l’objet de longues files d’attente devant les banques puisqu’ils viennent payer leurs remboursement en cash. Ces files d’attente qui nous surprenaient les premières fois au Mexique.
Encore et toujours la ceinture de feu du Pacifique
Nous continuons à être entourés de volcans. En Equateur, on en « approche » deux :
– le superbe Cotopaxi, coup d’cœur de Simon, bien que nous ne puissions pas en faire l’ascension ; le sommet est fermé car le volcan est de nouveau en activité depuis août 2015.
– le Chimborazo, où notre camping-car atteint son record : il nous amène au refuge à 4800 m !
Il fume de toutes les couleurs, mais il roule bien tout là-haut ! Le Chimborazo, c’est le sommet le plus haut du monde, si on prend comme référence le centre de la Terre et non la mer ! Eh oui ! La terre n’est pas tout à fait ronde, elle est aplatie au niveau des pôles et boursouflée au niveau de l’Equateur. Ainsi, le long de la ligne de l’Equateur, le rayon de la Terre est plus long d’environ 21 km qu’au niveau des pôles. Ainsi, l’altitude du volcan Chimborazo (6 263 m par rapport au niveau de la mer) est le sommet le plus éloigné du centre de la Terre, situé à 6 384 km ! Pas mal « le trucmachinbidule plus plus du monde » que j’ vous propose ce mois-ci, non ?
Un peu de politique
A Quito, nous assistons à la cérémonie officielle de la garde républicaine qui a lieu tous les lundis matins sur la place principale ; on nous dit que c’est un évènement organisé surtout pour le tourisme… Ca reste intéressant à voir puisque ça reflète, malgré tout, le fonctionnement de cette république. Et en plus, ce lundi, le président Correa est présent. C’est assez drôle de voir que les pompons de la garde sont faits en laine mal terminés, les boutons de certaines vestes tiennent du bout d’un fil, les lances sont en bambou.
Pendant nos 3 semaines en Equateur, on constate tout ce que ce Président a apporté au pays, en partie grâce aux revenus du pétrole : infrastructure routière, santé (avec l’accès aux soins gratuits pour tous), éducation — d’ailleurs, nous discutons avec des jeunes Colombiens qui sont en Equateur juste pour « profiter » de l’université gratuite, et retourneront en Colombie ensuite. En revanche, Correa a une approche très nationaliste quant à la politique économique de son pays : des affiches partout qui vantent « acheter des produits équatoriens » et des taxes d’importation démentielles. Oubliez le Nutella en Equateur ! Plus sérieusement, pour les Equatoriens, ces taxes d’importation sont douloureuses pour l’achat d’une voiture – qui coûte presque deux fois plus cher que chez leurs voisins. Bon, et puis deux p’tits mots moins flatteurs sur Correa :
- il est en train d’essayer de devenir président à vie,
- « il a vendu le pays aux Chinois » nous disent Tamara et Alfredo, deux étudiants qui viennent nous donner un coup d’main sur le drone en panne, suivi d’un apéro dans le camping-car… fini les apéros dehors, trop froid ! Nous entendons à plusieurs reprise cette critique à l’encontre du président, notamment parce qu’il aurait « offert » aux Chinois des régions d’Amazonie pour de l’extraction minière… affaires à suivre !
Un matin je discute avec une Indienne qui attend à un guichet du Centre de Santé proche de notre bivouac. Et là, je tombe des nues. Elle m’explique que tous les jours, les gens se présentent à 5h du matin devant la grille pour faire partie des heureux élus du jours à obtenir un ticket pour une consultation. Un certain nombre de tickets sont distribués par jour, en fonction du nombre de médecin présents ; la fin de la file peut revenir demain ! Mais ça a le mérite d’être un système de santé gratuit pour tous, notamment pour les Indiens.
Sur la route
Certes, les routes équatoriennes sont larges, plusieurs voies et asphaltées… Mais ça n’empêche pas les équatoriens de rouler comme des dingues. Exemple flagrant : on est dans un taxi à Quito et juste devant nous, un autre taxi très pressé fracasse le bras du policier qui fait la circulation. Le policier hurle de douleur en se tenant le bras ; mais ni le taxi qui l’a percuté ni le nôtre ne s’arrêtent ! Notre chauffeur nous explique que si son collègue s’arrête, il risque la prison ; et lui n’a pas l’intention de le dénoncer visiblement (alors que nous avons les numéros de la plaque d’immatriculation). Pourtant, c’est l’ seul pays où on a vu des auto-écoles de toute l’Amérique Latine ! On désespère de trouver un pays où la conduite est courtoise.
Chez Stéphane et Isabel
Cuenca, c’est une ville très agréable, où comme souvent dans ce cas, nous restons 4 jours au lieu de 2. Cuenca, c’est la ville où sont fabriqués les « chapeaux Panama » dont nous parle Fred depuis des mois !
Nous visitons donc une des fabriques de la ville. Pas la place d’en ram’ner en France, désolée… pourtant, ce n’est pas l’envie qui manquait !
A Cuenca, nous rencontrons Stéphane qui travaille sur le chantier du tram. Au passage, notons ici encore un bel exemple de la force commerciale d’Alstom, qui ne sévit donc pas uniquement dans l’Hexagone : Cuenca n’avait aucunement besoin d’un tram ; une voie dédiée au bus, comme à Quito ou Bogota, aurait été bien plus appropriée… Bref, Stéphane papote avec nous en attendant le matos de bétonnage, et nous invite chez lui le soir, avec un autre couple d’amis franco-espagnols. Son épouse Isabel, Equatorienne, nous explique son pays d’avant, et les enfants de s’amuser toute la soirée avec Teva et Mathis qui vivent aussi au rythme CNED, et Daniel. Merci merci pour cette chouette soirée et ces dégustations de bolones, tamales et quimbolitos (un délice).
Côté cuisine
J’écris ce carnet de bord alors que nous sommes au Pérou… et outre les routes à 4 voies, nous regrettons toutes les merveilleuses boulangeries et restos d’Equateur, bons et pas chers ! Il y a quand même quelques sopas qui ne nous ont pas toujours plu : la sopa est un bouillon où flottent morceau de poulet, maïs, patate, yuka, et os d’on ne sait quoi. On a aussi complètement craqué sur les beignets… pas bon pour la ligne, aïe aïe, aïe ! Mais comme on ne trouve plus de M&M’s peanut butter depuis longtemps, on peut s’permettre ;-). Ah ! J’allais oublier : on n’a pas osé goûter au cochon d’inde grillé, une spécialité du coin.
Et aussi…
Sur le marché à Otavalo, on voit des stands de faux produits Decathlon, notamment des sacs à dos Quechua. Il faut dire que cette marque si bon rapport qualité-prix est très connue des sportifs ici, mais il n’y a aucun magasin. Alors ils se font livrer des produits Decathlon lorsque des amis Espagnols ou Français viennent.
A 4800 mètres sur le Chimborazo, on croit rêver quand on voit un colibri ! Nous voyons fréquemment ces petits oiseaux depuis six mois (mais encore jamais réussi à prendre en photo ;-)), mais ici aux côtés des vigognes, on est surpris ! Wikipédia confirme ; il existe bien un colibri là-haut, appelé colibri du Chimborazo justement !
3 semaines en Colombie
Enchantés par la Colombie : ambiance festive, Colombiens souriants et véritablement très serviables, réseau routier nickel, paysages variés et très beaux, les bords de route ne sont plus des poubelles comme en Amérique Centrale et fini la poussière tant présente depuis le Mexique, activités sportives sympas et abordables, on y mange bien … Bref, à chaque endroit où on s’arrête, on reste trois fois plus longtemps que prévu. Quelques exemples :
- A Bucaramanga, cinquième plus grosse ville du pays, nous demandons à visiter l’atelier de fabrication d’un petit magasin de chaussures, en annonçant d’emblée que nous n’en achèterons pas (ce sont des chaussures à talon, et puis de tout’ façon ‘y a pas d’ place dans le camping-car). Et bien l’accueil n’en est pas moins pro ; et après la visite, les propriétaires nous proposent de nous ramener avec leur voiture plutôt que de reprendre un taxi puisqu’ils partent déjeuner.
- Nous nous installons 4 jours au centre de parapente Ruitoque, où le propriétaire Oscar nous fait découvrir dès notre arrivée les hormigas culonas qu’il est en train de ramasser (fourmis à gros cul) et nous les fait déguster chez lui le lendemain lorsque sa femme les cuisine ; quand on lui demande des infos pour acheter une bâche pour notre coffre de toit (qui prend l’eau depuis l’accident au Nicaragua), il fait immédiatement venir un artisan – l’artisan repasse le soir pour valider les mesures avec la toile, travaille tard le soir et tout le matin pour nous livrer à midi une housse sur mesure de grande qualité, et il insiste pour finir le travail c’est-à-dire la poser sur le coffre. Pro quoi !
- Nous nous arrêtons dans une petite bourgade à une trentaine de kilomètres de Bogota. C’est dimanche soir et les gars au bar nous offre leur tournée. Les enfants jouent au foot avec les jeunes sur le stade attenant et puis on joue tous ensemble au Tijo (pétanque locale avec des cailloux et un pétard en guise de cochonnet). Finalement, un de la bande nous demande de visiter la Casa Rodante … s’en suit le défilé. Le lendemain, les voisins qui ont entendu parler de cette visite nous demandent de jeter un œil… Puis ils nous invitent à prendre le tinto chez eux : il est 15h, nous sortons à peine de table mais il faut poliment manger la torta que la grand-mère nous a préparé : une sorte de pain perdu au fromage. Excellent, bien sûr, comme tous les plats colombiens.
En Colombie, ce n’est pas encore le tourisme de masse comme nous venions de le vivre au Costa Rica, mais les sites à ne pas manquer sont très bien indiqués et il y a pas mal d’infrastructures récentes et bien faites. C’est assez drôle de voir qu’ils construisent des monuments exprès pour le tourisme. Un exemple parmi d’autres, à Bucaramanga, il y a une énorme sculpture de la vierge sur une montagne qui surplombe la ville. Quand j’ai demandé des précisions sur ce lieu qui n’est pas indiqué dans notre guide, la réponse m’a clouée : « Elle a été construite l’année dernière. Il y a un téléphérique pour y aller. C’est pour le tourisme ». Autant dire qu’on évite ce genre de sites.
Et dans la série « Ici vous pouvez voir le truc le plus bidulemuche du monde », nous vous proposons ce mois-ci « la Sierra Nevada de Santa Marta, la montagne littorale la plus haute au monde, avec des pics à 5775 mètres à seulement 42km de la mer ».
La Colombie, c’est pour nous l’occasion de faire enfin réviser le camping-car ! J’dis « enfin » car tant en Amérique du Nord qu’en Amérique Centrale, il est très difficile de trouver un garagiste qui veuille s’occuper d’un Fiat français. A Bogota, nous avions un plan « garage Citroën ». Parfait, le temps pour nous de visiter cette ville : excellent musée de l’Emeraude, le grand musée de l’Or et la collection Botero. Pour éviter tout problème, nous sommes partis en ville en taxi, sans aucun sac ni appareil photo. Juste l’Iphone que Simon sortait en lieu sûr uniquement. Et en effet, nous ne voyons personne tenir son smartphone dans la rue.
Jamais nous ne nous sommes sentis en insécurité pendant nos 3 semaines en Colombie. Mais comme d’hab’, nous ne nous aventurons guère dans les lieux dangereux. J’aurais aimé visiter une mine d’émeraudes, puisque la Colombie a les plus belles émeraudes au monde. Mais bien que cette région soit désormais apaisée, il nous a été fortement déconseillé d’y aller seuls. Les guides n’emmènent pas les enfants de moins de 12 ans. Donc affaire classée. Preuve que des régions sont encore dangereuses, le gouvernement offre des salaires plus élevés dans les régions «narco » comme le Cauca afin de trouver des candidats aux postes !
Ce qui est étonnant en Colombie, c’est la quantité d’infrastructures dignes d’un pays développé (des grands centres commerciaux dans toutes les villes comme nous n’en avions pas vu depuis les Etats Unis) alors que la population, dans sa grande majorité, vit dans des conditions de pays en développement, encore pas mal de transport à cheval, etc…
Sur toutes les routes du pays, nous avons été étonnés du nombre de cyclistes (sport quasiment inexistant depuis un an que nous voyageons) : VTT, vélos de route… on a même vu des Lapierre ! Et certains nous parlent du Tour de France. Très souvent, les Colombiens nous saluent sur les bords de route, même les militaires lèvent le pouce. Plus que partout ailleurs, les gens, y compris les policiers, nous demandent, dès les premières minutes de conversation « Comment trouvez-vous notre pays ? ». Et ils sont ravis d’entendre qu’on adore ! Incroyable le nombre de R9, R12, R6, R18, 4L, toutes impeccables ! Et des Renault récentes aussi, bien plus qu’en Amérique Centrale (et pas besoin de préciser que les marques françaises sont quasi-inexistantes aux USA et Canada, contrairement aux marques allemandes). Et ça klaxonne de partout ; mais rien d’méchant en Colombie, c’est juste pour t’ prévenir qu’on t’ double… par la droite ou la gauche, ça dépend. Ça, c’est bien un truc qui n’a pas changé avec l’Amérique Centrale ;-).
Conclusion, la Colombie rentre dans notre top 3, avec le Guatemala et les Etats-Unis !